L’urgence dans les langues :
Interactions, médiations et interventions langagières en migration |
10 et 11 septembre – 9h/17h30 et 9h30/18h
| Inalco, 65 rue des grands moulins 75013 Paris – Amphithéâtre 7 & Auditorium

Depuis novembre 2017, les chercheur.e.s de Liminal, programme financé par l’Agence nationale de la recherche, étudient les interactions et les médiations langagières dans les temporalités de l’urgence, dans les centres et campements d’Ile de France, du Calaisis et de la frontière franco-britannique, à Briançon et à la frontière franco-italienne. Ces lieux sont autant d’espaces où la communication et la diffusion d’informations est à la fois vitale et entravée.  Aux contraintes physiques et psychiques qui s’exercent sur les sujets exilés s’ajoutent fréquemment des violences dans les langues et dans la traduction, que celle si soit insuffisante, inadaptée ou autour d’intraduisibles. Les langues dans l’urgence sont aussi, en conséquence, une urgence dans les langues.

A mi-parcours des travaux du programme Liminal, un premier état des lieux sur les langues dans l’urgence peut être envisagé dans ses différents aspects : juridiques et pratiques (accès à l’information, guides et niveaux de langues, outils de diffusion) ; structurels  (profils et fonctions des locuteurs engagés dans l’accueil et l’hébergement, représentations de la langue) ; de médiation (niveaux de traduction et de langues, médiateurs-pairs…) ; subjectifs (de position, d’engagement, de formes d’interaction) ; langagiers enfin, avec la création de nouveaux vocabulaires et de lexiques véhiculaires dans le vif de l’expérience. Glissements d’une langue à l’autre, emprunts et stratégies linguistiques par des populations multilingues, appropriation d’acronymes, détournements de sens, transformations des référents, caractérisent ces inventions élaborées pour et contre l’urgence, par utilité et résistance. Ces « bricolages » sont aussi ceux de salariés et aidants du premier accueil ; ils créent une zone de possibilités et d’incertitudes dans laquelle la communication non-verbale joue un rôle important.

Cet espace des langues et des pratiques langagières, octroyé ou conquis, met à l’épreuve les représentations de la nation et de l’hospitalité, les constructions croisées de la figure « des migrants » et de l’étranger, de leurs langues et cultures. Il questionne les fonctions des acteurs locuteurs et la diversité de leurs statuts (interprètes, médiateurs, « traduisants » informels), leurs relations avec les acteurs non locuteurs (acteurs étatiques, associatifs, bénévoles, militants, chercheurs etc.). Plus généralement, cette crise des langues dans l’accueil interroge les modalités de gestion de la « crise » migratoire, entre obligations légales et évaluation des besoins.

De fait, à travers les langues, ce qui se dessine est la place faite au sujet exilé, à la fois comme individu et comme élément dans un dispositif d’accueil lui-même en crise. C’est précisément sur ces enjeux que ce colloque entend revenir dans une perspective résolument multidisciplinaire réunissant dans chaque panel chercheurs et acteurs, réflexions et pratiques.

Plus d’information sur le site du CANTHEL – Centre de recherche en ethnologie de la Faculté des Sciences humaines et sociales – Sorbonne