Le vendredi 24 janvier 2020, de 15h à 18h, dans la salle 311 du site Pouchet du CNRS, à l’occasion du séminaire “Lire les sciences sociales” qui abordera la question de la réception et des usages des médias au sein des classes populaires, seront présentés et discutés en présence des auteurs deux livres de deux chercheurs du laboratoire Cerlis : celui d’Olivier Masclet L’invité permanent, la réception de la télévision dans les familles populaires, et celui de Dominique Pasquier L’internet des familles modestes. Enquête dans la France rurale.

  • L’invité permanent. La réception de la télévision dans les familles populaires (Armand Colin, 2018) d’Olivier Masclet (Université Paris Descartes, CERLIS).

Présenté par Wenceslas Lizé (Université de Poitiers, GRESCO)

Fini la télévision ? Abandonnée pour d’autres écrans ? Dans les familles ouvrières et employées, elle occupe toujours une place très importante. Alors qu’elle a pu être décrite comme la reine des foyers populaires, réunissant parents et enfants autour des programmes du soir, elle apparaît aujourd’hui comme un invité permanent. Bien plus longtemps allumée, elle rythme la vie quotidienne tout en offrant plus qu’un simple divertissement : celles et ceux qui la regardent cherchent à travers elle à répondre aux contradictions de leur position autant qu’aux exigences du monde contemporain.

Elle s’impose dans les foyers populaires autant qu’elle y est attendue. Cet ouvrage fait découvrir ces téléspectateurs en brossant plusieurs portraits. Trois questions l’organisent : Quelle place la télévision prend-elle dans les existences des familles populaires d’aujourd’hui ? Quelles relations entre les femmes et les hommes et entre les parents et les enfants ses usages mettent-ils au jour ? Que font les individus des images et des personnages reçus tous les jours à domicile ?

  • L’Internet des familles modestes. Enquête dans la France rurale (Presses des Mines, 2018) de Dominique Pasquier (Télécom Paris, CERLIS, CNRS).

Présenté par Samuel Coavoux (laboratoire SENSE, Orange)

Les individus modestes sont-ils exclus de la révolution numérique ? On l’a longtemps cru. Ils sont peu ou pas diplômés et exercent des métiers qui ne demandent pas d’usage de l’informatique. Pourtant, ils se sont pleinement emparés d’internet et en ont fait un instrument de leur vie quotidienne. La recherche en ligne leur a ouvert un monde jusque-là hors de portée : elle leur permet de percer le mystère des termes médicaux, leur fournit des armes pour l’aide scolaire aux enfants, leur ouvre de nouvelles activités. Des biens et des services, auxquels il leur était impossible d’accéder avant dans ces zones rurales, sont à portée de clic, à des prix imbattables. Internet est aussi un lieu de parole et de réconfort : dans l’entre soi des comptes Facebook sont confiés aux proches les drames de la vie en milieu populaire – le célibat subi, la perte d’emploi, les incertitudes du travail précaire.

Mais cette aventure a un coût. Ces outils, dont le potentiel d’individualisation est fort, fragilisent la vie collective familiale en multipliant les « moments à soi » entre conjoints et en rendant le contrôle de la sociabilité des enfants impossible. Les achats en ligne contribuent à détruire le petit commerce et à désertifier l’environnement immédiat. Les relations électroniques avec Pôle Emploi ou la CAF tournent souvent au cauchemar et transforment l’État providence en État tourmenteur.

Fondée sur des entretiens et l’analyse approfondie de comptes Facebook, cette recherche sur les classes populaires non précaires, éclaire la tension constante entre ouverture et risque que représente la course à la modernité électronique.

Vendredi 24 janvier 2020, 15h – 18h

CNRS/Site Pouchet, Salle 311

59 – 61, rue Pouchet, 75017 Paris

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